« DANTESQUE ! »

Le coup d’envoi de la saison sportive 2017 est donné.

Nous étions 10 à prendre part à cette première épreuve cyclosportive de l’année 2017.

Récit d’une folle journée.

♪ ♪ ♪ « 5 heures du mat j’ai des frissons, j’allume la radio et je monte le son… Chacun fait fait fait, c’qui lui plait plait plait ». ♪♪♪

Non mais t’es pas un peu barrée là ???

Good morniiiiiiing …Chantilly !

Ready to go ?

Musique à fond sur le trajet de départ, on est chaud chaud chaud … et sourd en arrivant !

Météo acceptable sur le site d’arrivée à 7h30. Normal, j’ai fait la danse du soleil la veille (j’ai juste oublié de préciser que je ne sais pas danser…).

Départ 9 heures. Dans les sas. Feu !

Déjà, ça s’annonce coton. Départ à fond la caisse avec côte pour commencer, chacun cherchant à se placer convenablement derrière un dos, pour les novices de ce type de course (la grande majorité d’entre nous), ça surprend un peu…. Et à peine le départ donné que le ciel se met à pleurer, bientôt à grosses larmes glaciales. Je ne pense qu’à une chose : trouver un abri dans un peloton. Déjà Colin me largue. Les autres ne sont pas loin.

L’obsession du dos me fait oublier les conditions météos qui se dégradent franchement.

10ème kilomètre, enfin, je suis planquée à l’abri dans un peloton, ce qui me permet d’éviter de m’envoler et de faire baisser ma FC un peu trop haute pour tenir 100 kil. Le vent s’est levé, de grosses bourrasques nous secouent dans tous les sens.

Une première difficulté avec une côte assez raide, je reste au contact. Je note au passage que mon groupe comprend deux coureurs revêtus d’un maillot portant l’inscription « ange gardien », tout de suite, j’y vois un signe encourageant.

Sauf que, quelques minutes plus tard, la route étant par endroit quasi inondée je m’encastre dans un nid de vautour, aie aie aie, la sanction ne manque pas d’arriver, je crève à l’arrière, en montée, je manque au passage de me faire percuter, je suis furax, une première crevaison là maintenant, non mais, Caliméro rugit : c’est trop injuste…

Et surtout très mal venu. En même temps je ne connais pas de crevaisons bienvenues….

 

Je me mets sur le côté et aperçois, à quelques encablures, deux cyclistes arrêtés en spectateurs. Je me mets à courir vers eux en portant mon vélo, et avec mon plus beau sourire en prenant un petit air de blonde, dans le style « SFR mais elle va apprendre », je demande : « vous pourriez m’aider à changer ma roue, j’ai crevé » ?

Les deux papys, serviables à souhait, me sauvent de l’abandon, et oui, mon matériel de réparation, c’est-à-dire la chambre à air de secours et la bombe de gonflage, étaient inutilisables, et mes sauveteurs du jour m’ont gentiment dépanné en me fournissant en chambre à air adaptée et en pompe manuelle pour gonfler. Pour ma part, dans le genre « blonde », je pense que j’ai gagné un an de décoloration chez Loréal.

Mes « papys » me lancent : vu que c’en est fini pour toi et les conditions météo franchement pourries, le plus sage est de faire demi-tour et de rentrer.

Ah que non ! jamais ! Je suis là pour boucler le parcours, je continue !

« Etre raisonnable en toutes circonstances, il faudrait être fou » (Raymond Devos).

La voiture balais passe, plus de 15 minutes pour changer cette f…g roue…. C’est la disqualification. J’aperçois Manu à l’intérieur. Mince… « J’ai cassé mon dérailleur » me lance-t-il. Je vois une grosse déception dans son regard. Et je le vois s’éloigner (avec le balais), j’ai l’impression d’être dans un film.

Je repars, définitivement seule (pour le peloton, c’est loupé, l’expérience n’aura pas duré longtemps !) et me rappelle les problèmes de mathématique de l’école primaire : considérant que je roule à environ 30km/h et que la queue de peloton s’achemine à environ 25km/h, je vais bien finir par rattraper quelqu’un …. Je manque de m’envoler à chaque bourrasque, peste contre le vent qui a toujours la bonne idée de souffler dans le mauvais sens, c’est dingue quand même….

Je me mets à chanter : ♫ quand t’es dans le désert ♪ depuis trop longtemps…..♫

Je pense à Ginou que j’ai aperçue, seule, et me dis que ça va être dur, dur, dur…

Je roule comme ça, « sans rien ni personne », pendant 5km : il pleut des chiens et des chats, le vent forcit. « Vous ne pourriez pas arrêter la soufflerie, là ???? ».

Soudain j’aperçois Apolline, étonnée de me voir revenir de l’arrière, je lui raconte mes mésaventures et poursuis avec elle. Nous continuons. La route se transforme en ruisseau par endroit, l’eau charrie les pierres, faudrait pas encore crever….

Au 38ème km, un rapide calcul (considérant que nous roulons à 20km/h, et qu’il reste 75 km…… je vous laisse imaginer la suite) m’amène à poser la fatidique question : Apo, t’es sure que tu veux continuer, si nous faisons demi-tour, on aura fait 80 bornes, c’est maintenant qu’il faut décider.

Ouf, Apo acquiesce, j’étais déjà congelée…et me voyais mal finir le parcours dans ces conditions là.

Au moment de faire demi-tour, nous croisons une voiture de l’organisation qui nous indique avoir enlevé la signalisation.

Arghhhh, et on fait comment, nous, pour rentrer, avec mon iphone trempé (et forcément inutilisables) et une méconnaissance totale de la région ??? Nous glanons quelques informations et rebroussons chemin. Heureusement que nous sommes deux.

J’ai froid, très froid, j’ai l’impression d’être un poisson sorti tout droit du congélateur Picard.

Je claque des dents d’une façon intempestive, Apo, pitié … avance. Apo est éprouvée.

Nous finissons par retrouver les derniers 20 km balisés. Nous sommes pulvérisées par la tête de course. D’habitude j’adore voir les élites passer, là, je dois avouer que ma seule obsession était d’arriver. Mon corps engourdi par le froid avait du mal à réagir (je devais donner des grands coups de point pour changer de vitesse) et mon cerveau était en train de rentrer en mode cryogénisation (heuh… j’ai pas encore rempli mon papier de fin de vie). Parfois, je descends du vélo et cours à coté pour me réchauffer en attendant Apo. J’encourage aussi les bénévoles signaleurs, eux aussi transis.

Soudain un croisement, un des signaleurs crie mon nom ! C’était l’un de mes sauveteurs !

Nous franchissons la ligne d’arrivée, Apo et moi, et arrivons à bon port. Ouf.

« je suis au bout de ma vie » me lance Apo.

Quant à moi, je suis au bout du congélateur. Et qu’on ne me parle pas de bains glacés de récup !

Les bénévoles ont été super, ils nous ont chouchoutés à l’arrivée.

Nous retrouvons Manu, qui résigné, estime finalement ne pas avoir trop perdu au change entre 110 km sous la tempête et la chaleur du gymnase d’arrivée. Manu, je comprends ta déception…

J’aperçois le vendeur de chez Lepape qui s’occupe de mon matos (pas le kit de réparation, je précise, j’aurais peut-être dû faire vérifier avant, ouh ouh ouh, la blonde !!). Il me dit avoir crevé trois fois et donc avoir abandonné. Peut être pas le bon plan le kit de réparation chez Lepape ???

Quelle hécatombe.

En voyant Colin arriver, je mesure à quel point les conditions étaient difficiles. Colin ressemble à un schtroumpf, il est bleu, tremblant, et met un temps certain à se réchauffer, lui qui pourtant est habitué des conditions extrêmes.

Puis arrivent les uns et les autres au fur et à mesure, bravo à tous qui avaient bouclé le parcours dans sa totalité, Ginou, Hervé, Louis-Alexandre, Luis, Fabrice (le moins éprouvé d’entre nous).

Bravo à Renaud qui est tombé au premier km, s’offrant un maquillage tendance spécial Jacques Gouin à l’œil et à la lèvre, et qui est reparti ensuite comme un beau diable, pour … casser le dérailleur à quelques km de l’arrivée…. Rageant.

On va commander un lot de dérailleurs pour la prochaine, hein !

Conseil pour les blondes : organisez un atelier technique !!

Et, finalement, que reste-t-il de la course :

  • coté perf, sur les 10 filles engagées, 3 du team Chantilly, les 3 sur le podium (bon, oui, cherchez l’erreur…). La médaille du courage pour Ginou et Apo. La médaille de la résilience pour moi.
  • un dépassement de soi inattendu : chacun a pu expérimenter ce moment où le compétiteur n’est plus qu’une volonté qui s’use dans une machine vide. Il commence alors à regarder sa montre, cette mécanique indifférente à la bataille intérieure que se livre l’athlète à lui-même, mais qui lui fait mesurer son désarroi. Pourtant, il faut continuer, une dernière sève coule en lui, mue par un sursaut d’énergie qu’il s’agit de dépenser à bon escient jusqu’à la délivrance finale.
  • une formidable aventure humaine : l’intelligence et les moyens physiques sont amers et ne paient pas s’il y a sécheresse de cœur (Gaston Rebuffat).

Nous repartons fourbus, mais heureux d’avoir surmonté les difficultés de la course pour les uns, la rancœur liée à la déception d’avoir dû renoncer pour les autres.

Musique à fond et bonne humeur sur le trajet de retour.

Vivement la prochaine !